Informations
Equipo Nizkor
        Bookshop | Donate
Derechos | Equipo Nizkor       

29sep20


UE: Viktor Orban exige la démission d'une commissaire européenne


Du gros temps en perspective. Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, a adressé une lettre à Ursula von der Leyen pour demander à la présidente de la Commission de démettre la commissaire européenne Vera Jourova, vice-présidente de ladite Commission. Une première dans le monde des institutions européennes. « Ces déclarations sont incompatibles avec son actuel mandat et sa démission est indispensable », conclut Orban. La commissaire tchèque, chargée des Valeurs et de la Transparence, a manifestement offensé le dirigeant hongrois dans une interview accordée au Spiegel dans laquelle elle a traité la Hongrie de « démocratie malade ». Ursula von der Leyen a fait savoir, dans la matinée de mardi, que la commissaire Jourova conservait sa « pleine confiance » et qu'elle répondrait à la lettre du Premier ministre hongrois.

Dans sa missive du 28 septembre, dont Le Point a eu connaissance, Viktor Orban considère que Vera Jourova « a insulté les citoyens européens de nationalité hongroise en déclarant qu'ils ne sont pas en position de se forger une opinion indépendante. Ces déclarations ne sont pas seulement une attaque directe contre le gouvernement démocratiquement élu de la Hongrie qui est devenue un lieu commun, c'est aussi une humiliation envers la Hongrie et le peuple hongrois. La première est inappropriée, la seconde est inacceptable », poursuit l'homme fort de Budapest.

La Hongrie dans le collimateur

Viktor Orban dénonce la violation de la « neutralité » de la Commission consacrée par le traité de Lisbonne. Selon lui, les propos de Vera Jourova « constituent une violation flagrante du principe de coopération sincère et empêchent tout futur dialogue significatif entre la Hongrie et la vice-présidente ».

Cet incident diplomatique majeur intervient à la veille de la présentation par la Commission - et notamment Vera Jourova - d'une revue générale sur l'État de droit dans les 27 pays de l'Union. La démocratie hongroise est particulièrement visée depuis plusieurs années et une procédure de sanction de l'article 7 a été initiée contre le gouvernement Orban par le Parlement européen qui s'appuyait sur un rapport soulignant divers griefs. Ce rapport a été vivement contesté par la Hongrie qui n'y voit que le coup de billard de ses opposants de gauche. Toutefois, une partie importante du PPE a voté ce rapport accusateur lors de son examen devant le Parlement européen.

La « démocratie illibérale », selon Orban

Depuis plusieurs années, Viktor Orban théorise, quant à lui, l'avènement d'une « démocratie illibérale » (ce à quoi Jourova faisait référence dans le Spiegel). Dans un article récent du Magyar Nemzet, le leader emblématique des V4 (Pologne, Hongrie, Tchéquie et Slovaquie) considérait que son combat idéologique contre la démocratie libérale gagne du terrain dans les esprits. « De plus en plus de gens font preuve d'un courage croissant en se libérant des entraves du mode de parole étouffant et restrictif, unique et approuvé, le seul concept approuvé de démocratie et la seule interprétation approuvée de l'Europe et de l'Occident, écrivait-il. […] Mais même si nous parvenons à échapper aux patrouilles systématiques de gardes-frontières libéraux bien payés, nous devons encore lutter contre les réflexes profondément ancrés d'une opinion publique toujours aussi bien intentionnée. Les arguments sophistiqués ne mènent nulle part : si l'on fait l'éloge du nationalisme, les Allemands souffriront de crampes d'estomac. […] Et si soyeux que nous parlions de démocratie illibérale, le terme est terriblement dur aux oreilles allemandes et anglo-saxonnes. C'est encore le cas aujourd'hui. »

La Commission, quant à elle, a défini l'État de droit au regard de plusieurs paramètres qu'elle va détailler, pays par pays, dès mercredi 30 septembre : des élections démocratiques, le pluralisme des médias, l'indépendance de la justice, et la lutte contre la corruption et les abus de pouvoir notamment au regard de l'application effective du droit de l'Union.

« Entendons-nous bien : ce n'est pas l'État de droit qui nous gêne, réagissait Georges Karolyi, l'ambassadeur de Hongrie à Paris, dans un entretien accordé au Point. Il est évident que l'État de droit doit être respecté au sein de l'Union européenne, nous n'avons jamais dit le contraire. Et nous sommes tranquilles là-dessus : la Hongrie est un État de droit. Ce qui nous gêne, c'est l'usage que certains en font : le problème vient du fait que certains, sous le couvert de l'État de droit, donc de considérations juridiques, cherchent à mettre en question, et à sanctionner, un certain nombre de choix politiques, principalement sociétaux, de la Hongrie, qu'ils ne partagent pas. Cette attitude nous semble profondément antieuropéenne, car ces choix sont parfaitement légitimes, ils ne menacent en rien ni les valeurs ni la cohésion de l'Union, et n'ont rien à voir dans un débat financier sur les fonds européens. »

[Source: Par Emmanuel Berretta, Le Point, Paris, 29sep20]

Tienda Donaciones Radio Nizkor

DDHH en España
small logoThis document has been published on 12Oct20 by the Equipo Nizkor and Derechos Human Rights. In accordance with Title 17 U.S.C. Section 107, this material is distributed without profit to those who have expressed a prior interest in receiving the included information for research and educational purposes.