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DERECHOS


30sep03


Aux groupes parlementaires argentins.


A Buenos Aires, le 30 septembre 2003.

Chers compatriotes,

Je m'adresse à chacun et chacune d'entre vous, car je suis très préoccupé par les manœuvres militaires désignées sous le nom d' "Aguila III" qui comprennent à la fois des forces aériennes d'Argentine, des Etats-Unis, du Brésil, du Chili, de l'Uruguay, du Paraguay et de la Bolivie, et dont le déroulement est prévu du 27 octobre au 7 novembre de cette année dans les provinces de Mendoza et de San Luis.

Cette préoccupation est partagée par des milliers de compatriotes. Avec eux tous, nous nous opposons à la réalisation de ces manœuvres militaires sur notre territoire national, étant donné que leurs caractéristiques et leur déroulement se situent dans le cadre de la dénommée "Doctrine de Sécurité Nationale". C'est cette même doctrine qui nous a été imposée pendant les dictatures militaires dans toute l'Amérique Latine et en particulier dans notre pays, avec pour résultat tous les graves dommages, les pertes de vies humaines et la destruction des capacités productives qui ont été provoqués, avec pour conséquence l'augmentation de la "dette externe", injuste et immorale, qui conditionne encore aujourd'hui la vie du peuple.

Ces manœuvres sont basées sur l'hypothèse d'un conflit interne avec les Forces Armées comme celui qui nous a été imposé pendant la dictature militaire, hypothèse toujours en vigueur, comme on a pu le constater durant les manœuvres précédentes de "Cabaña 2000" dans la province de Cordoba et de "Cabaña 2001" dans celle de Salta où les "ennemis" désignés étaient: le peuple, les organisations sociales, les ONG, ainsi que d'autres ennemis potentiels.

Un autre fait très préoccupant, c'est la demande d'immunité diplomatique ou d'immunité fonctionnelle réclamée par le gouvernement des Etats-Unis pour ses troupes, alors que, dans le même temps, il rejette la Cour Pénale Internationale des Nations Unies, refuse de reconnaître l'importance de ces mêmes Nations Unies et rend bien des peuples vassaux en provoquant des guerres et des conflits armés. Dans les conflits les plus récents, en Afghanistan et en Irak, le gouvernement des Etats-Unis a prétendu justifier ses interventions en parlant de "guerres préventives", et ceci, malgré la clameur des peuples du monde entier qui se sont rassemblés le 15 février de cette année pour réclamer la Paix.

Aujourd'hui, les Etats-Unis et la Grande Bretagne ne peuvent justifier les atrocités commises contre ces deux peuples. De plus, la longue histoire des interventions armées dans le monde a toujours été marquée par les conséquences néfastes qu'elles ont provoquées contre les peuples et contre l'humanité. Si aujourd'hui, les Etats-Unis viennent effectuer des manœuvres militaires dans notre propre pays, c'est pour défendre leurs intérêts économiques et politiques. De plus, afin de fortifier leur hégémonie mondiale et leur contrôle sur les populations, ils essayent de s'introduire dans les différents pays latino-américains grâce à leur projet de ZLEA (Zone de Libre Echange des Amériques). C'est vraiment là un nouveau mécanisme d'annexion de l'Amérique Latine par les Etats-Unis.

L'Argentine n'a vraiment pas besoin d'armes mais ce dont elle manque, ce sont des ressources pour la vie et le développement de son peuple qui vit actuellement très affecté par la faim et avec des indices très élevés du chômage, de la pauvreté et de l'exclusion sociale.

Il est nécessaire de développer des projets de vie et non des projets de mort.

Le pays essaye de retrouver sa route depuis longtemps perdue pour rétablir l'Etat de Droit avec le fonctionnement correct des institutions de l'Etat. D'autre part, l'Argentine est signataire de la Cour Pénale Internationale et les Etats-Unis ne peuvent exiger d'elle qu'elle la méconnaisse en donnant l'immunité à leurs propres troupes.

Le gouvernement et les législateurs de la Nation doivent agir avec une certaine cohérence entre le dire et le faire, et respecter le Droit et les Traités internationaux qu'ils ont signés. Mais ils doivent surtout fondamentalement penser à notre peuple et à ses besoins.

Il devient plus que jamais nécessaire d'ouvrir un débat national sur le rôle des Forces Armées Argentines dans la construction démocratique. Elles doivent faire partie intégrale du peuple, et « Plus Jamais» (Nunca Màs) elles ne doivent devenir des forces d'occupation de notre propre peuple.

C'est pour cela que je vous demande de rejeter les autorisations d'entrée dans le pays pour les troupes étrangères, et de rejeter l'immunité diplomatique ou fonctionnelle que le gouvernement des Etats-Unis réclame pour ses propres troupes.

Recevez un fraternel salut de Paix et de Bien,

Adolfo Perez Esquivel
Prix Nobel de la Paix

DDHH en Argentina

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Este documento ha sido publicado el 06oct03 por el Equipo Nizkor y Derechos Human Rights